Concert Rocé + Archie Shepp

“MA CARTE D'IDENTITÉ SUSPECTE, D'ÉTUDIANT NOIR, DE RAPPEUR BLANC...”

Ce soir, c'était Rocé, dans le cadre de Sons d'Hiver, festival très métissé.
Avec Jo, on a vraiment de la chance avec les concerts. Malgré la quantité de musique vivante qu'on s'enfile, c'est bon à chaque fois. Et en général très bon. C'était le cas ce soir.

Jeune, beau, politiquement incorrect, né José Kaminsky, en 1977 à Bab El-Oued (faubourg d'Alger) d'un père argentin d'origine russe et d'une mère algérienne, il sait ce qu'est la mixité.

Il chante. Et vraiment, que ce soit du rapp, du hip hop, du jazz, du slam, de la chanson, vraiment ce n'est pas le sujet.

Je vais écrire une énormité : avec d'autres, aussi métissés que lui (je pense à Abd Al Malik et à Ridan en particulier) il est, face à une nouvelle  chanson  française   qui contemple son nombril, ce cri qui vient de l'intérieur, invoqué par Lavilliers, comme on ne l'avait plus entendu depuis Léo Ferré.

Un des talents de Rocé, dans son disque et dans (au moins une partie de) sa tournée, est d'avoir invté l'immense Archie Shepp. Il vient pour quelques titres seulement, en fin de concert. On voit arriver ce vieillard qui incarna la révolution du free jazz le coeur serré. Il s'assoit pour jouer. Et au début, il donne l'impression d'un musicien du passé, venu se faire un cacheton en s'essoufflant dans son sax fatigué. Très "vieux nègre" au visage presque hébété. Alors, on applaudit par respect et affection. Et puis, son jeu s'anime. Le souffle se cachait en attendant le moment de dire "Hé, les mecs, je suis là". Les muscles s'échauffaient. Quand il prend des chorus en équilibre instable, manifestement improvisés, une giclée sauvage de notes monte vers le ciel et nous aussi. Archie Shepp salue, le poing levé, debout. Alors, on a envie de lever le poing aussi.

Avec ou sans Archie, il faut voir Rocé en concert. De vrais mots qui cognent, avec des harmonies qui déchirent la monotonie ambiante.

Et si elle était là, la "nouvelle chanson française" ?

Une photo et quelques vers de "Je chante la France".

"Moi j’ai des pays cassés, ce ne sont pas des prothèses
Liés par parenté, je n’ peux les mettre entre parenthèse
Et personne n’a à me dire le pied sur lequel je danse
Qu’elle m’accepte comme être multiple, et je chanterai la France"

Identité en crescendo, le site de Rocé : http://www.identiteencrescendo.net/index.html

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