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Les petits pavés
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5 août 2011

Cinéma en France : l'été Valérie Donzelli

Valerie_Donzelli_3Il y a les phénomènes de mode et les émergences utiles. On a parfois l'impression que tel acteur (Di Caprio, il y a peu) ou actrice est partout, au générique de (presque) tous les films. Ce fut Léa Seydoux, pour notre plus grand plaisir, puis Mélanie Laurent (déjà 5 films au compteur en 2011, dont l'excellent Beginners, plus quelques uns à venir) ou Cotillard (dont on se tamponne, non ?). C'est aujourd'hui Valérie Donzelli.

Depuis la découverte de La Reine des Pommes, début 2010, j'ai dû évoquer une quinzaine de fois cette pétillante actrice-réalisatrice (auteure, habilleuse, coiffeuse, musicienne, parolière, chanteuse etc.), notamment ICI, ICI ou ailleurs. On se souvient (voir ICI) que Télérama avait, fin 2010, omis de proposer La Reine des Pommes (ainsi que Crimes de Vincent Ostria) parmi les films soumis aux suffrages de ses lecteurs pour le palmarès de l'année. Mais après plus de 10 années de carrière et une trentaine de films et téléfilms (dont l'excellente mini-série TV Les camarades du discret François Luciani avec, déjà la fidèle Laure Marsac et le précieux Malik Zidi), 2011 est et sera manifestement l'Année Donzelli.

Cinq films présentés à Cannes comportaient son nom au générique. Quatre de ces films sont sortis en salles, et se présentent comme les échantillons du dernier à venir (mais déjà présenté au public à diverses occasions), La Guerre est déclarée (en salles le 31 août). Occasion pour le fan que je suis, groupy assumé de la Valérie, de revenir sur ces quelques films, qui seront tous sortis entre le 1er juin (Belleville Tokyo) et le 31 août (La Guerre est déclarée). Un été Donzelli.

La couleur musicale de ce tour d'horizon est emprunté au générique de fin de En ville. Seventeen seconds des Cure.

 
Belleville Tokyo d'Elise Girard ou comment rester ensemble quand on n'aime plus les mêmes films.
Affiche Belleville TokyoFilm cinéphile, ce premier long d'Elise Girard se présente comme le discours de la méthode, drôle et sensible, élégant et mélancolique d'une séparation. Marie et Julien travaille dans le cinéma, elle comme attachée de presse des cinémas Action (une des beautés du film est de nous introduire dans l'envers du décor du Grand Action), tout comme la réalisatrice, lui est critique. Le vrai sujet du film semble être : peut-on poursuivre une aventure amoureuse lorsqu'on ne partage plus la même conception du cinéma ? La réponse du film, un film qui ne traite pas le cinéma par dessus la jambe, est évidemment négative, au risque de désespérer.

Une autre beauté du film est de poser Jérémie Elkaïm (qui assurait tous les rôles masculins de La Reine des Pommes) et  Valérie Donzelli comme couple, moderne et complexe, ce couple fût-il, dans le film, en crise. On se souvient des grands couples du cinéma qui, de Bogart-Bacall à Laurel et Hardy, sont généralement américains, les couples du cinéma français étant de complaisance (Gabin et Morgan firent leur petite affaire amoureuse hors champ). Ce serait une bonne chose pour le cinéma français que ce couple là s'impose dans la durée. La Guerre est déclarée en sera-t'elle le signe ?


Pourquoi_tu_pleuresPourquoi tu pleures ? de Katia Lewkowicz ou comment ne pas se marier.
Ici, Valérie D. joue les (f)utilités (?) aux côtés d'un Benjamin Biolay déjà rencontré en 2008 sous la direction de la même Katia Lewkowicz dans le court C'est pour quand ? et, en studio, pour le superbe album biolesque La superbe (sans oublier les chansons enlevées de La Reine des Pommes co-écrites par BB et VD). Si BB, donc, mérite, dans son rôle d'adulescent gâté fils-à-maman et frère-de-sa-soeur pleurnichard et mécontent de tout, des claques, VD mériterait une bonne fessée. Bonne actrice, elle montre vis à vis de sa réalisatrice une certaine générosité dans sa bonne volonté à interpréter de manière convaincante un personnage de conne insupportable inféodée à une famille hystérique.
Dans cette charmante comédie parfois teintée de mélancolie, c'est Emmanuelle Devos qui étonne par la richesse de son jeu en grande soeur agitée mais dépositaire des névroses de son entourage.

En_VilleEn ville de Valérie Mréjen (avec qui Valérie D. avait débuté sa carrière au cinéma, dans Valérie, en 1999) et Bertrand Schefer, ou comment ne pas partir.

Si la participation de Valérie à ce film singulier est parfaitement anecdotique, En ville apparaît dans la production française actuelle comme un objet rare, précieux et qui appelle l'attention. Exceptionnellement, éprouvant certaines difficultés à parler du film, j'ai demandé à une personne proche, dont le point de vue m'a semblé particulièrement fécond, d'écrire à ma place. Merci à toi pour le texte qui suit.
Amour ou amitié, on ne saurait dire quel lien sentimental unit Iris et Jean. C’est dire si les
 histoires d’A. sont complexes. Lorsqu’une jeune provinciale, rongée par l’ennui, rencontre un photographe voyageur, il serait plutôt question d’alter ego.
Avec leur film riche d’une brièveté qui lui permet d’atteindre son but sans se fourvoyer, Valérie Mréjen et Bertrand Schefer offrent à Lola Créton un rôle saisissant qui nous incite à espérer pour la jeune actrice une brillante carrière. On la retrouve interprétant un personnage féminin proche de celui qui la révéla il y a peu au grand public dans Un Amour de jeunesse. A nouveau, elle campe une jeune femme qui oscille entre deux hommes, l’évident premier amour, aussi paumé qu’elle, et l’inattendu homme d’âge mûr, artiste dans l’âme. Sauf que, contrairement à Camille qui semblaitEn Ville - Lola Créton subir ce tiraillement, Iris tente de maîtriser sa vie par une certaine forme d’égoïsme, motivée par son envie dévorante de mettre les voiles. Cette force de caractère s’incarne dans le regard noir de l’actrice qui domine l’écran ; un regard téméraire, mais pas effronté, un regard de résistante désenchantée. Iris crache ses vérités à la gueule du monde que ça plaise ou non à celui-ci. Ce sont des déclarations sans appel qui nous laissent avec une interrogation : la vérité ne sortirait plus de la bouche des enfants mais des adolescents, situés entre une innocence relative et une lucidité désarmante.
Histoire d’A. sans drame, En Ville dresse également le portrait singulier d’un couple éphémère et platonique lié par la photographie. Tandis que Jean (rare et précieux Stanislas Merhar), en mouvement permanent, fixe pour toujours les images d’une ville qu’il ne fait que traverser, Iris donnerait tout pour échapper aux paysages qu’elle ne peut plus encadrer. Aussi, le sort est ironique lorsque son énigmatique visage se retrouve placardé sur les murs gris de son pays natal.
Empreint de mélancolie, En Ville ne commet pas la faute de nous dire que tout ira bien, ou mieux, en témoigne le Seventeen Seconds signé The Cure qui clôt cette aventure et nous rappelle « The dream had to end - The Wish never came true ».

Val_rie__L_art_de_s_duireL'Art de séduire de Guy Mazarguil ou comment coucher quand on est psy et rigide de la touche.
Si Valérie Donzelli apparait dans cette minuscule comédie comme un rayon de soleil, c'est sans doute que son scénariste-réalisateur n'a pas potassé le manuel de la FEMIS, Comment séduire son public... Je n'aime pas dire ça d'un film, surtout d'un premier film, mais L'art de séduire est un film nul. Malgré un certain nombre de gags  inattendus et réjouissants, malgré le charme paresseux de Mathieu Demy en psy blasé coaché par un client, malgré la présence de Julie Gayet, dont le charme est totalement anesthésié par un rôle plombant, il n'y a pas grand chose à sauver dans ce film heureusement assez court, surtout pas la fin, téléphonée et qui donne l'impression que l'auteur a manqué de pages pour terminer son scénario. La présence fantasque et fantaisiste de Valérie, rayonnante mais en roue libre, ne peut sauver ce qui, pensé, écrit, filmé, aurait pu être un film.

La Guerre est déclarée de Valérie Donzelli ou comment survivre avec élégance.

photo_La_Guerre_est_declaree_2010_2Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm, un merveilleux couple de cinéma

Les inrocks a pu dire de La Guerre est déclarée qu'il avait constitué l'événement du Festival de Cannes 2011. Dans le contexte un peu gris d'un cinéma français bien trop recroquevillé sur lui-même pour songer à prendre le large (sauf quelques rares films fauchés et/ou underground), le deuxième long métrage de Valérie Donzelli, événement de Cannes, risque fort d'agir localement comme un grand accident climatique traumatisant pour le petit milieu des professionnels de la profession. Appel d'air, appel au jaillissement de la vie, geyser d'émotion et d'énergie, catalyseur de toute volonté émancipatrice, ce film qui, entre des mains plus frêles aurait tourné au mélo pleurnichard et moralisateur (un enfant malade, des parents qui se battent contre le système, forcément émollient -- Cotillon et son Caneton auraient fait ça très bien) devient entre les mains agiles, nerveuses, puissantes de la jeune réalisatrice-actrice un acte de (re)naissance, un pont roulant vers le bonheur d'exister, de respirer encore et plus que ça, de respirer ensemble. C'est un peu comme si Minelli mettait en scène (le Minelli de Band wagon) un remake de Douglas Sirk, en musical, pourquoi pas. Il y a dans La Guerre est déclarée un sens musical, un sens du rythme qui nous entraînent vers la comédie musicale, ses valeurs, son volontarisme joyeux (The Band wagon, encore).

La_guerre_est_d_clar_e_photo

A nouveau et pour la quatrième fois, Valérie et Jérémie Elkaïm forment ici un couple de cinéma qui renvoie aux grands mythes hollywoodiens. Un couple confronté au vide sidéral de la mort possible d'un enfant et qui invente le bonheur, dans une sorte de compromis sidérant entre un égoïsme qui aide à tenir et une invraisemblable tension vers les autres, qui aide à vaincre la peur.

Pour une fois le cinéma français tient un grand film populaire non putassier, une réalisatrice qui, de film en film se montre plus inventive, plus gonflée (ce qui manque tellement à ce côté de la planète film) et impose une vision de plus en plus ample de son art. La profession ne s'y est d'ailleurs pas trompée et un mois avant la sortie nationale du film, la bande annonce était visible et la RATP ornait le cul de ses bus de l'image radieuse de Valérie et Jérémie :

La Guerre et la RATP

Alors, puisque la dernière raison de retourner au cinéma est bien le plaisir qu'on peut encore y trouver, ce blog lance dès aujourd'hui un petit buzz à usage de ses lecteurs cinéphiles (OK, de ses lecteurs donc) avec un petit rappel de temps en temps. Non, le bonheur n'est pas dans le pré, il est, parfois, dans les salles de ciné.

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Commentaires
M
Heureux d'avoir pu agrémenter ton réveil, Emma.<br /> Tout ce que tu dis à propos de valérie D. et de son compagnon (actuel ? ex ? peu importe, ils se comportent en public -- je veux dire présentation de films, interviews, conférences de presse -- comme un vrai couple, qu'il soit de cinéma ou plus, ils sont parfaitement complémentaires, chaque mot de Jérémie semblant le commentaire ou l'exégèse, c'est selon, de la geste donzellienne)me touche. J'ai longtemps péché dans le désert, me faisant passer pour le groupy de service dans une indifférence polie pour assurer le service avant-vente de cette artiste multicartes étonnante de peps et d'émotion, drôle et sensible. Que tu assures le relai me rassure car si tes réseaux te suivent, la gloire de la belle demoiselle est certaine. Encore conviendrait-il que la gloire de VD (et JE) reste modeste, trop de succès risquant de nuire à la créativité.<br /> Tu ne dis pas quel film, sur les 5 révélés à un public esbaudi entre le 1er juin et le 31 août, figurera assurément dans ton Top Ten 2011. L'Art de séduire, dont tu trouves mon approche "fielleuse" ? En ville, parfaitement chroniqué dans l'article (par une personne invitée, pas par moi) ? Belleville Tokyo, qui nous fait voyager dans les mystères de la cinéphilie amoureuse ? Pourquoi tu pleures (je connais tes coupables penchants pour le triste Biolay, le plombeur d'ambiance que personne ne veut plus inviter à une soirée, excepté les soirées crémation) ? Ou sera-ce La Guerre est déclarée, le Petits Mouchoirs du riche ?<br /> Pourquoi pas la réponse dans un futur article de ton blog, que tu négliges depuis trop de lustres, nous contraignant, lecteurs esseulés, à chausser nos vieilles lunettes pour relire en boucles blondes tes vieilles chroniques. Enfin, on peut te lire ici, chère lectrice-commentatrice, et constater que tu n'as pas perdu, VF ou VO, de ton sens de la formule.<br /> Pour Clara Sheller, sa copine pénible et son frère pianiste (William ?) merci pour toute info, forcément précieuse.<br /> Bises et bonnes soirées télé et ciné.
E
Sais-tu que tu as rendu mon réveil jouissif ? Le "Seventeen Seconds" des Cure me fait toujours autant d'effet.<br /> Je suis très heureuse, pour toi, pour tes lecteurs, que tu aies pu rédiger cet article sur la riche actu donzellienne. Qui d'autre pour mettre à l'honneur la reine des billes ? <br /> Elle est pour moi une très belle découverte printemps/ été, faite grâce à toi et initiée par le pétillant "La Reine des Pommes" vu en DVD car loupé au ciné (et ce malgré tes encouragements, déjà à l'époque). Elle forme avec Jérémie Elkaïm un couple très attachant et vivifiant, un couple en création au sein duquel la Dame mène la danse sans que cela ne perturbe sa moitié, bien au contraire. Ils ont sans doute trouvé leur équilibre fondé sur une mutuelle admiration et l’envie de jouer le jeu de la créativité en inventant leurs propres règles. <br /> Il faudra que je te fasse une sélection de leurs apparitions dans la série "Clara Sheller". Valérie interprète la meilleure amie un peu pénible de Clara, dans la première saison, tandis que Jérémie fait son entrée dans la suivante (et dernière) pour reprendre le rôle du frère pédant de l’héroïne. <br /> Tu crois qu’il suit sa fantasque camarade à la trace ?<br /> J’aime beaucoup la photo que tu as choisie pour illustrer le passage (fielleux) consacré à « L’Art de séduire ». V.D. lance un regard dans lequel on pourrait lire : «Toi, mon p’tit gars, je vais t’en faire baver » et prend un air de pestouille qui doit commencer ses phrases par un « J’chai pas » faussement nonchalant. <br /> Quant aux cinq films que tu évoques, l’un d’eux figurera assurément dans mon Top 10 filmesque de l’année, aux côtés d’un éleveur de dinosaures prétentieux et, je l’espère, d'un nazi machiste. Heureuse compagnie pour Valérie.<br /> Même si le temps est à la pluie, je te souhaite un très bon week-end dans la plus belle ville du monde
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  • Le cinéma c'est comme la vie, mais c'est la vie 25 fois par seconde. On ne peut pas lutter contre le cinéma. Ça va trop vite, trop loin, même si le film est lent, il court, toi tu ne peux que rester assis et regarder.
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