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Les petits pavés
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11 décembre 2010

Leni Riefenstahl, Brecht et Bowie. Où est la morale ?

Je ne souhaite choquer personne, surtout à l'approche de Noël.

Je reprends. Ça ne me dérange absolument pas de choquer, parfois, mais ce soir (il est 22:36), j'ai conscience d'avoir choisi une image qui pourrait susciter des interrogations. Certes. Mais cette image, je la trouve belle, même si son esthétique ne cesse de m'interroger, même si elle est signée Leni Riefenstahl. Elle représente (on pourrait dire "met en scène" ou "magnifie") une athlète à l'allure de danseuse photographiée dans le camp Olympique, à l'occasion des Jeux de 1936, à Berlin. 

Danseuse, actrice, photographe, réalisatrice, Leni Riefenstahl est aussi connue pour sa coupable complaisance envers le régime nazi. D'un point de vue esthétique et cinématographique, l'œuvre de Riefenstahl a inventé une grammaire visuelle au classicisme ambigu, mais troublante, comme un jeu de mot de Lacan. Amie personnelle d'Hitler, elle ne se résume pas à cela. J'imagine que je n'agrandis pas mon cercle d'amis ce soir, mais ce n'est pas le but.

Leni est morte vieille mais sportive, après avoir été mise à l'écart du cinéma allemand, ce qui est la moindre des choses, puis avoir photographié de magnifiques africains, puis, dans un sursaut sportif lié à son grand âge, des poissons, car vers la fin de sa vie, elle plongeait.

A ceux qui seraient gênés par ce choix de montrer une image de Leni R., je dirai : je lis Céline et Aragon, Mishima et Genet et je pense qu'on ne peut jouer (en tournant des films complaisants comme La liste de Shindler ou Holocauste) avec la Shoah. Mais les images de Leni Riefenstahl ne peuvent être associées à la Shoah. A mon sens.

Et j'aime dans cette image : la féminité que je ne peux associer aux crimes contre l'Humanité et le côté jauni, vieilli, flétri du papier, qui me fait penser à certains livres de mon enfance. Cette image vit dans le passé, qu'elle y reste, elle y est belle).

vrouw

J'avais l'intention de confronter l'image atypique de Leni Riefenstal à la culture allemande. C'est le Baal, première pièce écrite par un Bertolt Brecht jeune poète de 20 ans non encore corseté par son légendaire didactisme, son agaçante distanciation, non encore marxiste en somme, mais nourri de poésie française rimbaldienne. En 1982, David Bowie fut un magnifique Baal, pervers, dionysiaque et scandaleux (ce qui nous éloigne de Mère Courage...). Il en reste un disque court (5 titres, tous écrits par Brecht pour sa pièce, mais dont la musique fut réécrite par Dominic Muldowney, à l'exception d'un seul titre signé Kurt Weill. Voici le formidable Baal's Hymn, formidablement orchestré par Muldowney et interprété par un Bowie habité, possédé, formidable lui aussi.

Je voulais tirer David Bowie (si j'ose écrire) vers la culture allemande, ce qui ne peut faire injure au joli blondinet. Mais en rentrant chez moi, tout à l'heure, dans le froid et sur la glace fondue, je continuais à écouter Bowie, après les cinq titres de Baal (oui, je me documente dans les transports avant d'écrire le soir) et je suis tombé (boum, gag récurrent) sur le concert qui accompagne la fabuleuse réédition de Station to Station. C'était a Nassau, au Coliseum, c'était en 1976. The Jean Genie n'est pas le meilleur titre de ce fabuleux concert, mais il ne dure que 7 mn et quelques. Contrairement à Panic in Detroit, qui ose les 14 mn (là, je perds 95 % de mes lecteurs, pressés par obligation, d'où mon manque de courage). Donc, The Jean Genie.

 

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  • Le cinéma c'est comme la vie, mais c'est la vie 25 fois par seconde. On ne peut pas lutter contre le cinéma. Ça va trop vite, trop loin, même si le film est lent, il court, toi tu ne peux que rester assis et regarder.
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