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Les petits pavés
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12 février 2010

Les Incidences de Philippe Djian

Philippe Djian publie un livre et comme il est généreux (ou courageux ? non, ça se saurait) il en sort un deuxième. Le deuxième s'appelle La fin du monde, c'est une nouvelle associée aux créations du peintre Horst Haack. On peut en voir un aperçu en CLIQUANT ICI.

Djian_philippeMais l'actualité de Philippe Djian, c'est la publication d'un roman, moins d'un an après Impardonnables qui nous avait, à nouveau, laissé sur le cul. Comme j'aime partager, y compris avec les personnes qui ne lisent pas LIbé (ni Philippe Djian ?), je reproduis ici une entrevue lue dans le Libé-livres de cette semaine. Ce qui me plait dans cette entrevue et que j'ai envie de partager ? Ce n'est pas une leçon d'écriture, juste les paroles sans conséquences d'un écrivain sans autre prétention que de savoir contraindre la langue à servir son désir. Mais c'est dur, c'est pas simple d'écrire.

Voici le début de l'entretien, ça serait bien que vous cliquassiez pour lire la suite. Puis, comme je ne pouvais rapatrier la vidéo de 1984 de Ph. D. parlant à la télé de Zone Érogène, livre qui fait du bien, je vous file le lien : CLIQUER ICI.

lg_libe

Le nouveau roman de Philippe Djian ne sera pas remboursé par la Sécurité sociale. Incidences est un hymne à la cigarette, ah «le mélange d’air pur à la nicotine». Le personnage principal, qui vit avec sa sœur depuis qu’une enfance horrible les a soudés, est un universitaire à la tête d’un atelier d’écriture. L’établissement est français, doté de moyens réduits. Le professeur couche avec ses étudiantes, mais découvre l’amour avec la belle-mère de l’une d’entre elles, dont il a jeté le cadavre. C’est un homme sympathique, migraineux, qui aime Zuckerman, le héros de Philip Roth, et s’écrie «Qu’on nous rende Marguerite Duras, par pitié», quand la production contemporaine est trop médiocre.

Incidences est plus léger qu’Impardonnables.
Il y a moins de pathos. Cela vient du fait aussi que ce n’est pas écrit à la première personne, on s’identifie moins. Le personnage est un type un peu particulier, quand même. La manière dont j’utilise le «il» en fait un «je» camouflé.
A quel moment décidez-vous que cela va être «il» ou «je» ?
Je ne décide pas. C’est la première phrase, il y a un type dans une voiture, ce n’est pas moi, ce n’est pas «je», c’est quelqu’un. Ça part comme ça. Je ne peux que répéter ce que disait Salinger, «j’écris des livres que j’ai envie de lire». Je trouvais drôle - je ne l’ai pas pensé tout de suite, je ne savais pas que le type allait trouver cette fille morte dans son lit, je suis aussi étonné que lui quand il se réveille - je trouvais drôle l’idée que même chez quelqu’un de très dérangé, ce qu’il est, il y a une espèce de normalité. On est tous un peu comme ça, à des degrés divers, quand les choses sont trop lourdes, on les cache, on les met sous le tapis. La fille, que va-t-il en faire, elle est morte, on ne va pas revenir là-dessus, si ça se sait il va avoir des ennuis, le plus simple est de s’en débarrasser.
Dans les histoires, ce qui m’importe est de voir ce que le style et l’écriture peuvent faire d’un matériau banal. C ’est bien de partir très bas, et de monter le niveau. On peut utiliser les ressorts du polar sans se cantonner au polar. Ça me plaisait de démarrer avec un assassin, et de voir comment il était en dehors des moments où il tue. Il est professeur de creative writing : quand il est normal, il m’intéresse.

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Commentaires
M
Merci pour ce texte qui aurait donné envie de vous lire plus. Merci pour l'élégance extrême, merci Bruno Chauvierre, chauvierre001@yahoo.fr, d'avoir dévoilé le ressort et la fin de ce livre dont je me réserve la lecture pour plus tard, après la suite du passionnant quatuor de David Peace (1974, 1980 etc.), après le James Ellroy, après d'autres peut-être. Merci, alors que d'autres se contentent de commenter mes modestes billets, d'avoir reproduit ici un article de votre blog dont je ne donnerai pas l'adresse. Bien qu'il ne manque pas d'attraits.
B
Il baise ses étudiantes, sa soeur et une policière à ses trousses.<br /> <br /> Le trouble profond de Marc est finement analysé au décours d'un récit captivant. Ex-enfant martyrisé, sadisé par une mère hilare, il garde le souvenir de sa maison en flammes, l’année de ses 14 ans. L’incendie le délivra des sévices de cette mère castratrice peu réceptive aux investissements affectifs : ” Elle était en combinaison, penchée sur un tiroir de sa commode. Le jour où il avait surpris sa mère dans cette tenue, elle l’avait saisi à la gorge…” (P.90)<br /> <br /> Père, dévalorisé et peu viril. Père maternel . Père faible. La mère bat les petits devant lui. Il ne les défend pas, se traite de ” parfait misérable”, et pleure devant eux à chaudes larmes. Dans cette continuité, Marc s’efforce de “ne pas sembler trop minable” (p.182). Il protège sa soeur. Marianne est au coeur de ses songeries et de ses jalousies depuis qu’elle est épilée et courtisée par Richard, son collègue détesté : ” Il songea de nouveau au sexe de sa soeur, désormais lisse comme la peau d’un abricot ou d’un cuir fin, d’excellente qualité, pâle comme une amande fraîche, en tout cas proprement renversant - la simple idée que richard pût y glisser la main l’étourdissait, le frappait à toute volée, littéralement.”<br /> <br /> Marc est comme étranger aux drames survenant tout près de lui. On pense à Camus. Banalisation dirait un Psy. L’étudiante Barbara meurt à ses côtés dans son lit. Lors d’un contrôle routier, un policier l’interpelle et tombe raide-mort d’une crise cardiaque. Il jette simplement les corps dans un trou :<br /> <br /> « Il poussa la dépouille du policier jusqu’à l’extrême bord de la faille et ensuite le catapulta dans le vide en utilisant ses deux pieds comme des ressorts. Puis il rampa vers le gouffre afin de s’assurer que tout était en ordre, que rien n’était visible, que les ténèbres avaient tout effacé. Mais tout était parfait. » (p.151)<br /> <br /> Quand il arrive vers ce trou, il entre en transes. des hallucinations l’envahissent, avec toujours sa mère en toile de fond. Enfant il a failli périr dans cette crevasse. Marianne, sa soeur l’a sauvé: ” C’est dire à quel point nous sommes liés. ” (p.162). Depuis, il y enfouit les morts qu’il ramasse sur sa route. Surtout, il se cache dans ce trou pendant des jours et des nuits, s’estimant ” relativement comblé par son séjour dans son intimité minérale et moussue ” (p.152) <br /> <br /> Se réfugier dans les entrailles du sol lui redonne la vie que sa mère lui a reprise. Lorsque la lune se lève, “ il voit le fantôme de sa mère traverser le ciel et voguer dans les nuages, au-dessus des cîmes.” Au fond dans ce livre, personne ne meurt jamais vraiment, même ceux que Marc jette au trou. Ceux qui croisent marc sont immortels. la vie terrestre n’est qu’une étape du cheminement éternel de l’esprit.<br /> <br /> Ce gouffre est comme hanté par un revenant qui lui porte chance. Marc est en rapport avec l’au-delà. Il vit dans un monde où corps et âmes se disjoignent, surtout dans la chambre de sa sœur Marianne : « L’odeur de cette chambre était réellement troublante – elle l’avait toujours été. L’odeur de cette chambre au matin, lorsque Marianne ne s’était pas encore levée, comme si une partie de son corps s’était évaporé durant la nuit et flottait dans l’air tiède. »<br /> <br /> Quand il ne rôde pas autour de ce fameux trou, Marc “s’arrime” à sa soeur : “Sans doute trouvaient-ils duplaisir à faire ce qu’ils faisaient, une fois qu’ils étaient allés trop loin, mais cela n’avait rien de tès sexuel, au sensou on l’entend aujourd’hui, cela avit davantage à voir avec une ultime connexion cérébrale, avec un furieux besoin de s’arrimer ensemble le plus étroitement possible…” ( p.179) L’arrimage est tel qu’il caresse la cuisse de Myriam, la policière, en pensant à sa soeur.<br /> <br /> Si le gouffre se remplit, la béance de son manque-à-être va être comblée par Myriam, la femme mûre dont il tombe éperdument amoureux. Scènes torrides. Se présentant comme la belle-mère de l’étudiante Barbara, Myriam est en fait un policier ! Avec elle il devient adulte, lui qui n’a” jamais eu de relation avec une femme de plus de vingt six ans.” Longues descriptions de séances de harcèlement sexuel dont il est victime de la part des étudiantes. D’habitude c’est plutôt le contraire à ce qu’on dit ! Avec son look un peu déjanté, son besoin d’être protégé, son aura de prof. il allume ses étudiantes, dont il ne peut ensuite se défaire. Il se fait même casser la gueule par des hommes de main mandatés par Annie, l’étudiante éconduite.<br /> <br /> La découverte de la véritable identité de la policière Myriam, noue la fin d’une intrigue bien menée. Marc, s’offre une dernière nuit d’amour avec Myriam. C’est chaud. Puis il ouvre le gaz, allume son briquet. Tout explose. Comme il y a quarante ans. Eternel retour freudien du même, dans un livre masculin, mettant fin à une série d’ouvrages féminins où l’homme est simplement présenté comme un salaud. Pas si simple
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  • Le cinéma c'est comme la vie, mais c'est la vie 25 fois par seconde. On ne peut pas lutter contre le cinéma. Ça va trop vite, trop loin, même si le film est lent, il court, toi tu ne peux que rester assis et regarder.
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