Dennis Hopper et le nouvel hollywood - Cinémathèque française 2008
Dennis Hopper "The last movie" (1971)
Je cite l'intro de l'exposition : "Dennis Hopper est à la fois le héros et le fil rouge de l'exposition, construite à partir de nombreux extraits vidéo, de plans inédits de Dennis Hopper aujourd’hui, à Los Angeles, d’archives rares , et évidemment de ses photographies et créations at large (billboards géants, sculptures imposantes). L’originalité de ce projet étant d’y adjoindre des œuvres provenant de la collection privée de D. Hopper, qui réunit aujourd’hui des œuvres emblématiques de l’art contemporain : Warhol, Basquiat, Ruscha, Salle, Rauschenberg, Herms, Berman… Ces œuvres résonnent en écho avec la pratique artistique et cinématographique d’Hopper lui-même..."
Cette expo relève d'une ambition large et généreuse, comme un film en cinémascope : dans un jeu de miroirs, montrer un homme dans son époque et restituer une époque à travers un homme. L'époque est celle de la colonisation des cerveaux par l'Amérique. Elle se confond singulièrement avec mon vécu, le genre d'histoire dont on connait à peu près le début et quelques points culminants, mais dont on ignore la fin.
Une fois passé l'agacement (Hopper buvant un verre de lait, Hopper faisant son lit, Hopper avec tel ou telle ...) provoqué par l'inévitable impression de narcissisme due au type même de l'exercice, c'est avec un plaisir sans frontière qu'on déambule dans l'expo Dennis Hopper et le Nouvel Hollywood. En premier lieu, j'avoue être passé à côté sinon d'un créateur de premier plan, du moins d'un témoin privilégié des événements et tendance qui font une époque comme le furent, chacun dans son style et en leur temps, Jean Cocteau et Serge Gainsbourg. Cinéaste et acteur, photographe et graphiste, peintre et créateur d'objets, écriveur, sinon écrivain, du moins écriveur et découvreur de talents et de nouveautés. L'expo est l'occasion de redimensionner l'artiste, l'homme-époque, l'époque incarnée.
Avoir vu (regardé, entendu, presque "senti") l'expo Hopper juste avant la victoire de Barack Obama fut un bonheur et une promesse. Une des photos exposées fut prise en Alabama en 1965 et montre un prêche-discours du Pasteur King, dont les combats précurseurs trouvent des correspondances et comme un écho amplifié aujourd'hui, alors que l'Amérique se reprend à épouser nos rêves. On sait que Hopper, qui votait curieusement républicain depuis Reagan, a soutenu Obama. Les choses reprennent leur place.
Pour évoquer l'événement, une interview d'Hopper, un dialogue avec Wim Wenders organisé par la Cinémathèque (je me refuse à commenter la laideur glacée du bâtiment élevé à la gloire du béton et du cinéma, séduisant comme le souffle du goulag, tout près de la sémillante locataire du ministère des finances), des photos, des reproductions, un article de Gérard Lefort sur le road movie - hors expo mais qui colle bien au sujet -, un bric à brac un peu fourni en hommage à un professionnel du dilettantisme qui a su traverser le siècle en dandy, sans se prendre les pieds dans l'absurdité de notre temps.
Interview Libé « Je me voyais comme un créateur » Interview Dennis Hopper. Rencontre avec le héros de la contre-culture, à l’heure d’une rétro-expo. Recueilli par GRÉGORY SCHNEIDER « Vous ne l’avez pas vu passer ? On l’a perdu. » Dennis Hopper (62 ans) était de passage à Paris la semaine dernière, pour promouvoir la rétrospective et l’exposition très complètes - photos, peintures et films, joués ou réalisés par lui - que lui consacre la Cinémathèque française (1). Après avoir joué à cache-cache avec son attachée de presse, il a accepté le principe du name dropping à propos de quelques-unes des innombrables rencontres qui ont façonné celui qui, depuis le milieu des années 60 jusqu’au début des années 80, symbolisa la contre-culture américaine, à la fois acteur, réalisateur, artiste et grand collectionneur d’art. Nicholas Ray (cinéaste américain, avec lequel Hopper a tourné la Fureur de Vivre en 1955) : Jasper Johns (peintre et artiste conceptuel américain, photographié par Hopper en 1962) : Francis Ford Coppola (cinéaste américain qui a di- rigé Hopper dans Apocalypse Now et Rusty James) : Cartier-Bresson : |
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Roger Corman (cinéaste américain qui a dirigé Hopper dans The Trip) :
« Corman était le prince du cheap, il bouclait l’affaire en un week-end sans payer personne. Il ne finassait pas, la première prise était toujours bonne [rire]. C’était un type merveilleux, mais bon : quand on est allé au restaurant après le tournage, il a calculé exactement ce que chaque personne devait : "Toi, tu dois 3 dollars 50, toi tu dois 4 dollars 20…" Il avait quand même une sorte de génie à la Warhol : il ouvrait le journal et il avait dix idées de films à la minute, de quoi inonder le marché des drive-in ; c’était le but. »
(1) 51, rue de Bercy, Paris, XIIe et expo photos sur le voyage au 3, rue Cassette, Paris VIe.
Quelques shots de l'expo
images photographiées ou peintes par Dennis Hopper
Multi Image of a Woman's Face (2000)
Space Triptych (1996)
Le dialogue entre Hopper et Wenders à la Cinémathèque : (en deux parties)
Les amis américains
Voir aussi :
"Hopper par Hopper", une leçon de cinéma (Cinémathèque Française)